Obsolescence programmée : le grand gâchis
Editorial.
Tout a été fait pour raccourcir la durée de vie des produits, faisant fi des
consommateurs et des enjeux environnementaux. Or des solutions existent pour
stopper cette gabegie.
LE
MONDE | 29.12.2017 à 12h00 • Mis à jour le 29.12.2017 à
13h50
Editorial
du « Monde ». Produire, acheter, jeter.
Pendant des décennies, nos sociétés de consommation ont vécu au rythme de ce
cercle vicieux, dont le cycle n’a cessé de s’accélérer. Afin de maintenir une
croissance qui menace de s’essouffler, tout a été fait pour raccourcir la
durée de vie des produits, inciter à
leur renouvellement sans nécessairement se préoccuper des
conséquences environnementales de cette course au consumérisme.
La prise de conscience de
l’impasse à laquelle conduit cette logique a été tardive, mais les initiatives
se multiplient pour tenter de
la remettre en
cause. Ainsi, le parquet de Nanterre a ouvert, le 24 novembre, une enquête
préliminaire visant le fabricant japonais d’imprimantes Epson. Celui-ci est
accusé d’« obsolescence programmée » et de « tromperie ».
C’est une première en France,
pays précurseur qui a fait de l’obsolescence programmée un délit. La loi sur la
transition énergétique de 2015 prévoit, en effet, une peine maximale de deux
ans de prison et une amende de 300 000 euros dans le cas où un
fabricant serait reconnu coupable de « réduire délibérément la
durée de vie d’un produit pour en augmenter le
taux de remplacement ».
Culture
du jetable
En l’espèce, Epson est suspecté
d’avoir poussé les consommateurs à racheter des
cartouches d’encre, quand bien même celles-ci n’étaient pas vides. Selon ses
détracteurs, un autre stratagème aurait été utilisé concernant une pièce, dont
le prix de remplacement équivaut à celui d’une imprimante neuve. Le fabricant
aurait ainsi intentionnellement persuadé les clients de changer prématurément
de machine.
Apple fait l’objet d’accusations
similaires. Le fabricant californien est mis en cause pour avoir bridé
certains smartphones afin d’en ralentir le
fonctionnement, incitant ainsi les utilisateurs à se procurer un
modèle plus récent. Des plaintes ont été déposées aux Etats-Unis, en Israël et
en France, à l’initiative de l’association Halte à l’obsolescence programmée,
déjà à l’origine de l’action contre Epson.
Ces deux affaires sont à resituer
dans le contexte de la culture du jetable. Aux Etats-Unis, chaque année,
1,8 million de tonnes de déchets électroniques sont mis à la poubelle. En
France, chaque habitant en jette une vingtaine de kilos par an. En trente ans,
la durée de vie d’un ordinateur a été divisée par deux et, depuis le début des
années 2000, le taux d’appareils ménagers défectueux remplacés dans les cinq
premières années d’utilisation a quasiment doublé pour atteindre 13 %.
Quant aux téléphones portables, ils sont remplacés en moyenne tous les vingt
mois.
Les consommateurs, invités de
façon plus ou moins contrainte à se rééquiper, ont le sentiment grandissant de
se faire gruger.
A cela s’ajoutent des enjeux environnementaux avec l’extraction toujours plus
intensive des ressources pour fabriquer ces
objets, qui, de surcroît, ne sont pas toujours recyclés.
Des solutions existent pour stopper cette
gabegie. D’abord, il faut changer nos comportements qui conduisent parfois
à confondre marketing
et véritable innovation. Ensuite, il faut inciter les fabricants à allonger la
durée de vie des produits. Un rapport des Nations unies publié en septembre
recommande de l’afficher au moment de l’achat. Il propose également de remettre
en cause l’exclusivité des réseaux agréés par les fabricants sur les pièces
détachées et les réparations. C’est, enfin, en passant progressivement d’une
économie de la possession à une économie de l’usage que l’on aura peut-être une
chance de ralentir cet immense gâchis.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/12/29/obsolescence-programmee-le-grand-gachis_5235676_3232.html#lakoWMiqQAMIHHFT.99
Merci Nacho , c´est trés interesante!
RépondreSupprimer